Juin 2016

Schizophrénie. Personnalisé et sans rupture, le parcours doit viser le rétablissement

Pr Franck Schürhoff


La schizophrénie est une pathologie mentale, chronique, très invalidante qui touche entre 0,6 et 0,8 % de la population mondiale. Pour l’OMS, il s’agit de la huitième cause de handicap chez les 15 à 44 ans. Elle représente un lourd « fardeau »* pour les patients, leurs proches, le système sanitaire, le système social et médicosocial et la société en général.

 

Promouvoir des soins précoces et personnalisés

Du fait de sa fréquence, de sa sévérité, et de son évolution chronique, la schizophrénie exige un diagnostic précoce, des soins sur le long terme, des mesures d’assistance sociale et sanitaire et des structures de soins intermédiaires. De plus, la complexité, la richesse et la variabilité des tableaux cliniques en fonction des individus font que chaque malade est un cas particulier et, de ce fait, justifie la promotion d’une médecine personnalisée qui consistera à adapter le traitement et la prise en charge à chaque cas.

 

Aujourd’hui, la prise en charge des personnes souffrant de schizophrénie reste centrée autour des équipes de secteur qui interagissent avec les structures sanitaires, médico-sociales et sociales, sur lesquelles viennent se greffer des structures innovantes comme les centres experts. Dans ce contexte, le principe du parcours de soins est particulièrement adapté à la prise en charge sectorielle fondée sur le principe de la continuité des soins.

 

Des progrès considérables au cours de ces dernières années

Ces progrès concernent aussi bien l’identification des facteurs de risque associés à la maladie, l’identification des mécanismes biologiques ou cognitifs sous-tendant les symptômes que la prise en charge des patients.

 

Par exemple, dans ce dernier domaine, l’importance du dépistage précoce ainsi que la qualité de la prise en charge des premiers épisodes suscite un intérêt croissant pour l’étude des « états prodromiques » et/ou des « états mentaux à risque » avec comme objectif de diminuer le taux de transition vers un état psychotique avéré. Les comorbidités psychiatriques (dépression, suicide, etc.) et somatiques (cardiovasculaires notamment) qui grèvent l’espérance de vie des patients sont de mieux en mieux évaluées et prises en charge. On observe une meilleure prise en considération de la qualité de vie et de l’environnement des patients.

 

Les traitements médicamenteux et non médicamenteux (remédiation cognitive, psychoéducation, thérapies cognitivo-comportementales, etc.) se sont également considérablement développés ces dernières années, avec comme corollaire une amélioration du pronostic de la maladie. À noter que l’implication des familles, par l’intermédiaire de différents programmes dont la psychoéducation, a contribué à diminuer le taux de rechutes chez de nombreux patients.

 

Faire progresser les coopérations et la coordination

Des voies d’amélioration demeurent, notamment dans le domaine de l’intervention à domicile, et dans l’accompagnement dans leur quotidien de patients souvent jeunes, améliorations qui passent par le développement d’équipes mobiles en psychiatrie. Le développement de structures de soins intégrés prenant en charge à la fois la pathologie schizophrénique et les addictions aux substances (notamment au cannabis) semble nécessaire devant le constat d’une très faible collaboration entre les services de soins en santé mentale et en addictologie. Enfin, il faudrait travailler à de meilleures coopérations entre les usagers, les familles, les associations, et les acteurs professionnels venant du monde sanitaire (dont les médecins généralistes), social et médico-social, ainsi qu’à une meilleure coordination entre ces derniers. •