Juin 2018

Faculté à conduire

Comment convaincre un patient de ne plus conduire ?

Certaines pathologies ou certains traitements sont susceptibles d’altérer les facultés à conduire. Au cours d’une consultation, le médecin peut ainsi découvrir que l’un de ses patients ne dispose plus de toutes les aptitudes requises pour cette activité. Il doit alors l’informer sur les risques encourus pour lui et pour les tiers et tout mettre en oeuvre pour le convaincre de ne plus conduire.

L'association Prévention routière, avec le soutien de la MACSF, sensibilise régulièrement les professionnels de santé sur les risques de la conduite pour leurs patients, à travers notamment des messages de prévention et une brochure disponible en ligne. Comme le rappelle le Dr Thierry Houselstein, directeur médical à la MACSF, « les professionnels de santé sont un maillon essentiel dans la sensibilisation des patients à l’impact de certaines pathologies, addictions, traitements ou états de santé particuliers sur la conduite ». Ils sont souvent les mieux placés pour les informer et les sensibiliser sur les risques encourus, leur entourage n’étant pas toujours écouté ou entendu. Le patient conducteur, âgé ou non, reste pleinement responsable de ses actes, mais s’il est atteint par une affection incompatible avec le maintien de son permis et donc la poursuite de la conduite, il doit se soumettre à un contrôle médical. Tout conducteur doit signaler à l’administration toute pathologie ou handicap susceptible d’avoir des effets négatifs sur sa capacité de conduite. Il doit également prévenir son assureur pour l’informer sur sa pathologie ou son handicap susceptible de modifier les clauses du contrat qu’il a signé.

 

INFORMATION ET SECRET PROFESSIONNEL

L’examen médical du médecin généraliste et l’interrogatoire qui en découle comportent des éléments utiles pour l’appréciation de l’aptitude ou du maintien de l’aptitude à la conduite. Le médecin est ainsi en première ligne : il doit expliquer à son patient les conséquences de sa pathologie ou de son handicap sur la conduite et l’informer des risques assurantiels ou judiciaires en cas d’accident responsable. Il doit l’informer, si besoin, de son obligation, en tant que conducteur, de se soumettre de sa propre initiative à l’examen d’un médecin agréé pour le permis de conduire. Le médecin a un devoir d’information à l’égard de son patient et il lui incombe de prouver qu’il l’a bien informé sur sa pathologie et ses conséquences, notamment au regard des risques pour la conduite.

 

L’information orale n’est pas toujours suffisante et convaincante : il faut consigner ces conseils dans le dossier médical du patient et ne pas hésiter, pour certains cas difficiles, à envoyer au patient, parfois par courrier recommandé, des recommandations écrites. La privation de conduite peut être mal vécue et peut avoir des incidences sociales et économiques, notamment en milieu rural. Elle peut aussi être ressentie comme une privation de liberté, d’autonomie et de reconnaissance, notamment chez une personne âgée. S’il connaît les proches du patient, le médecin peut leur faire part de son inquiétude même s’il reste tenu au secret professionnel dans la mesure où la loi n’a pas prévu d’exception au secret professionnel pour le signalement des conducteurs à risque. Comme le soulignent les auteurs de la brochure , « on peut s’interroger sur la pertinence d’une adaptation des textes sur ce plan, mais l’on observe que la loi oblige un médecin à signaler un patient sportif qui prendrait des produits dopants (nocifs uniquement pour lui-même et pour l’éthique sportive), alors qu’il n’autorise pas le signalement d’un conducteur de car scolaire qui serait diabétique, épileptique ou toxicomane ». Si les effets secondaires de certains traitements peuvent présenter des risques pour la conduite, la pathologie de certains conducteurs (personnes âgées, personnes fragiles…) peut aussi avoir des effets négatifs sur l’aptitude à la conduite. Un médecin peut également être confronté à un patient qui n’a plus de permis mais qui continue à se déplacer avec un véhicule sans permis, non concerné par la réglementation sur l’inaptitude à la conduite. Mais comme le rappelle l’Ordre, « le médecin a le devoir d’attirer l’attention de son patient inapte à la conduite sur les risques d’accidents, toujours réels, qu’il peut créer en conduisant, y compris ce type de véhicules ».

Nicolas Loubry

 

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