Septembre 2014
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Il serait grand temps de changer de logiciel !

Dr Alain Trébucq, directeur de la publication
Edito

Depuis un certain nombre d’années, l’inadaptation de notre système de santé aux besoins actuels de la population est une évidence. Conçu au milieu du siècle dernier pour répondre à des situations essentiellement aiguës, il apparaît aujourd’hui de plus en plus inadapté pour prendre en charge le vieillissement de la population et le développement des maladies chroniques. Discontinuité et fragmentation de l’offre de soins le caractérisent. Les comparaisons internationales montrent que malgré un coût de dépenses plus élevé que la moyenne des autres pays de l’OCDE, son niveau d’efficience interroge ; et dans une période de faible croissance, son financement devient de plus en plus aléatoire. Il serait temps de le reconnaître et de lancer non pas des réformes partielles mais une réforme globale, en profondeur, de l’ensemble de notre offre médicale et sociale, afin de répondre aux besoins réels de la population. D’autres pays ont entrepris cette démarche depuis longtemps mais la France, reine de la procrastination, comme dans bien d’autres domaines, remet à plus tard un chantier à l’évidence pourtant criante. Et ce n’est pas dans l’esquisse de la stratégie nationale de santé présentée par la Ministre en juin dernier qu’on devine une refondation globale de notre système de santé désormais indispensable.

Cette refondation doit constituer pour les Français un projet sociétal majeur mené avec pragmatisme, en indiquant d’emblée les objectifs à atteindre, les moyens d’y parvenir, les grandes échéances. Créer une continuité de l’offre de soins, faire en sorte que chaque acteur de santé se consacre à des tâches en adéquation avec son niveau de formation et en perçoive une juste rémunération, développer des métiers intermédiaires, éduquer et responsabiliser le patient, renforcer les soins primaires et lutter contre les hospitalisations évitables, favoriser les regroupements professionnels et le travail collaboratif sont quelques-uns des projets stratégiques susceptibles de définir un projet global pour la santé en France, projet global pour lequel les technologies numériques seront un formidable facilitateur.

Certes, une telle réforme sera difficile car elle remettra en cause bien des situations acquises et bousculera de nombreux corporatismes. C’est la raison pour laquelle, comme indiqué dans le rapport « La France dans dix ans »[i] rédigé sous l’autorité de Jean Pisani-Ferry, une telle réforme devra se faire par paquets de mesures et non pas à pas, pour que dans le temps, les bénéfices des unes compensent les coûts des autres. Les réactions récentes aux initiatives portant sur les délégations de tâches illustrent parfaitement le bien-fondé de ce propos car comment faire passer une telle délégation si les médecins ainsi déchargés de tâches simples doivent, tout en restant à une consultation valorisée à 23 euros, se concentrer sur les tâches les plus complexes ?

En France, « on élit un Père Noël tous les cinq ans avant de comprendre au bout de deux ans que sa hotte est vide » écrit l’économiste Christian Saint-Etienne. C’était peut-être vrai jusqu’à peu mais aujourd’hui, les Français ne croient vraiment plus au Père Noël ! La situation du pays est telle que les Français sont prêts à adhérer à des réformes en profondeur pour peu qu’ils en comprennent la pertinence, l’équilibre et la justice. Avec une nouvelle rubrique (voir en pages…) consacrée à la refondation de notre système de santé, Le Concours médical apporte sa contribution au débat ; enquêtes, tribunes, interviews se succéderont mois après mois, sans autre parti pris que la défense d’un système de santé égalitaire mais efficient et permettant l’épanouissement de chacun de ses acteurs.   

 

[i] « Quelle France dans 10 ans ? Les chantiers de la décennie », France Stratégie. www.strategie.gouv.fr/blog/france-10-ans/

 

Commentaires

refonder le système de santé, ce n'est pas avec une belle déclaration de bonnes intention comme celle çi que l'on y arrivera , il faut du CONCRET pour répondre aux problèmes que posent cette sécu obèse dont le budget en fait un état dans l'état, ingérable car il s'agit plus d'un terrain de jeux politiques de luttes d'influence que les intervenants ne voudront pas lâcher sans lutter pour s'y maintenir. Répondre aux jeunes diplômés qui ne s'installent pas, et ils ont raison de refuser nos conditions d'exercice, répondre aux patients , de mieux en mieux informés et c'est heureux et qui s'organisent en associations de malades, ils sont parti prenante de notre système de santé et il est urgent de leur donner la place qui leur revient. Répondre aussi au problème que posent la loi de Bachelot qui instaure un système décisionnel uniquement au bon vouloir du ministre. Utiliser l'e-santé , la santé numérique est devenue incontournable.
Les médecins , unis, libéraux et hospitaliers publics et privés, doivent assumer pleinement leur rôle en s'ouvrant aux autres intervenants notamment les associations de malades pour faire des propositions concrètes et les imposer par la lutte si nécessaire.
Ce n'est pas gagné, loin s'en faut , mais sauver notre système de santé est un enjeu sociétal majeur que les médecins doivent assumer.

Contributions

  Notez bien, chers lecteurs, la provenance de notre message. Nous sommes à Chittagong (Bangladesh), dans 10 ans, le 17 Mai 2025. Patrice et moi venons de débarquer à l'Aéroport...

Malheureusement le praticien libéral isolé va disparaître dans les 10 ans à venir. Il va disparaître sous l'effet des contraintes du tiers payant et de l'augmentation des charges. Resterons...

Pour une refondation efficace du système de santé :   1°) Education des patients dès le plus jeune âge sur l'utilisation correcte du système de santé. Permettrait de ne pas encombrer les...